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«Economie et gouvernance de la donnée»

Duboc. S, Noël. D-J, Avis, Conseil économique, social et environnemental, Paris, février 2021, 114 p.

La transformation numérique et le développement des techniques, ont permis, selon cet avis, d’accumuler puis de consolider une somme considérable de données. En effet, «le traitement massif de ces données, leur juxtaposition, leur corrélation ouvrent aujourd’hui la possibilité de multiplier à l’infini les connaissances, sur les sciences, les techniques, mais aussi sur les hommes».

La donnée qui peut être définie comme tout enregistrement factuel sous forme numérique (en fonction du contexte : images, textes, vidéos, caractéristiques physiques d'un objet, résultats d'analyses ou d'enquêtes, etc.), «nécessite des équipements matériels et des logiciels pour sa collecte, sa sauvegarde, son traitement et sa réutilisation. L’exploitation de ces données offre un champ considérable d’opportunités économiques et de développements. Elle est cependant susceptible de générer des violations aux droits et libertés fondamentales souverains régissant la vie en société».

Il est vrai, note l’avis, que la numérisation a engendré de considérables progrès dans la vie quotidienne, par exemple dans l’accès à la culture et au savoir rendu plus facile, généralisé, diversifié, mais il n’est pas moins vrai qu’elle a aussi impacté les relations avec les administrations, la gestion des entreprises, en permettant des gains de productivité substantiels.

Ainsi, «dans le domaine médical, les technologies les plus sophistiquées sont devenues accessibles : imagerie, scanners, miniaturisation de l’électronique pour des interventions chirurgicales de haute précision, alliant l’efficacité à la suppression des effets opératoires invasifs, diagnostics connectés. Dans ce domaine si particulier qui touche à la préservation de la vie ou à la réduction de la souffrance, les avancées scientifiques ont apporté des progrès importants».

Mais ces prouesses technologiques s’accompagnent, d’un autre côté, «d’une collecte anonymisée des données de santé par les organismes gestionnaires de l’Assurance Maladie, alimentant la recherche médicale, permettant de développer les thérapies nouvelles ou des médicaments innovants».

Sur un autre plan, la détention de l’information, c’est-à-dire la capacité de collecter, de croiser et d’analyser ces données, confère d'une part une forme de pouvoir économique, d’influence d'autre part, et enfin de domination.

Or, la gouvernance de la donnée est aujourd’hui éloignée de cette définition idyllique, «compte tenu des intérêts divergents et des tensions extrêmes entre les principaux acteurs de cette technologie», le marché mondial du Big Data devant représenter plus de 200 Md$ de chiffre d'affaires en 2020.

Ainsi, la «Stratégie européenne de la Commission sur les données» établie en 2020, a identifié neuf espaces communs de données, jugés déterminants : «l’industrie (utilisation des données à caractère non personnel), le pacte vert (appui aux actions prioritaires sur le changement climatique, l’économie circulaire…), la mobilité (transport intelligent, voitures connectées…), la santé (prévention, détection et guérison des maladies…), la finance (transparence du marché, financement durable…), l’énergie (partage intersectoriel des données, solutions innovantes), l’agriculture (analyse des données de production…), l’administration publique (transparence, application effective du droit…), les compétences (renforcer l’adéquation compétences et marché du travail…)».

La Commission européenne a par ailleurs, estimé que le volume mondial des données devrait augmenter de 530% d’ici à 2025 en passant de 33 zettaoctets en 2018 à 175 zettaoctets en 2025 (1 zettaoctet correspondant à 10 puissance 21 octets, autrement dit mille milliards de gigaoctets).

A noter ici que la donnée brute en tant que telle, n’a pas de valeur mais qu’elle devient importante à partir du moment où elle est retraitée, analysée, synthétisée. Elle devient significative lorsqu'elle est croisée et combinée avec d'autres données.

Dans le même temps, souligne l’avis, la mise à disposition de données libres et ouvertes, produit de la valeur économique et sociale par le biais de cinq mécanismes générateurs de valeur : «la réduction des coûts de transaction (la gratuité des données baisse le coût de transaction), l’innovation (création de nouveaux produits grâce aux données), la réduction des asymétries d’information (les acteurs ont les mêmes données), la collaboration et les boucles de rétroaction (partager une information contribue à modifier les comportements)».

Or, certaines données, comme les données structurées ou semi-structurées, sont encore très peu utilisées à des fins d’analyses, tout en représentant pourtant 40 % des données disponibles dans leurs systèmes d’information.

Autrement, «les données existent et sont disponibles, mais elles sont encore peu exploitées par l’entreprise, faute le plus souvent d’une architecture capable de supporter la diversité des données et des solutions technologiques qui permettront d’absorber les volumétries de données dans des conditions optimales de performance et raisonnables de coûts. La donnée nécessite donc un système d’analyse pour être utile».

Par ailleurs, l’essentiel des données et notamment les données personnelles des citoyens européens, transitent aujourd’hui par internet, utilisent les GAFAM et sont donc sous le contrôle des États-Unis. Les GAFAM pèsent plus de 4 900 milliards de dollars en Bourse et l’on anticipe qu’Apple va bientôt devenir la première entreprise à dépasser les 2 000 milliards de dollars.

Par cette domination technique, ces entreprises disposent d'outils pour contrôler la vie de plusieurs millions d’individus. Près de 80000 requêtes sont effectuées chaque seconde sur Google, soit 6,9 milliards par jour, plus de 720 000 heures de vidéos sont mises en ligne quotidiennement sur YouTube et 145 milliards de courriels envoyés.

Le volume mondial de données sera par conséquent, multiplié encore par 3,7 entre 2020 et 2025, puis par 3,5 tous les cinq ans jusqu'en 2035, pour atteindre la somme vertigineuse de 2 142 zettaoctets. Cela pose la question de «la capacité de nos sociétés à fournir l'énergie nécessaire pour faire face à cette hausse exponentielle du volume de données échangées».

C’est pour dire que les enjeux de gouvernance de la donnée dépassent le cadre des économies nationales, mais également le pouvoir d’action des États et parfois même celui des institutions internationales : «la puissance numérique alliée à la robustesse économique des grandes mégapoles numériques, constitue une force multilatérale avec laquelle tous les pays du monde doivent désormais compter».

Face à ces outils régaliens, les risques sont multiples: «déstabilisation des économies nationales (violation des règles de concurrence libre et non faussée), concentration des opérateurs, effets multiplicateurs de réseau portant atteinte aux potentiels économiques des Nations. Ces atteintes sont en outre, amplifiées par la détention de masses de données considérables par des opérateurs susceptibles de renforcer, par les informations qu’ils peuvent extraire, leur efficacité économique. Placés en position de monopole, technologique et de marché, ils interdisent ainsi l’apparition d’entreprises concurrentes».

Cela est d’autant plus périlleux que «les outils internationaux de régulation, de normalisation et de contrôle, portent uniquement sur le fonctionnement structurel des vecteurs de données et non sur le contenu logistique ou la conformité du message aux règles couramment admises par les institutions internationales».

Rubrique «Lu Pour Vous»,

10 novembre 2022

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