La jeunesse représente le public le plus large des radios privées marocaines. Mais tout le monde n'est pas satisfait des programmes offerts aux auditeurs.
Par Naoufel Cherkaoui pour Magharebia à Rabat – 27/12/10
Cela fait quatre ans que le Maroc a autorisé les stations de radio privées à émettre sur les ondes nationales, dans le cadre de l'effort visant à mettre un terme au monopole gouvernemental sur le secteur audiovisuel.
Les experts ont décidé qu'il était temps de faire le point sur leurs évolutions.
"Les stations de radio font face à des défis, en termes de respect de la pluralité dans la société et de présentation de médias démocratiques qui puissent refléter la multiplicité communautaire existante," dit Moustapha El Khalfi, directeur du Centre Marocain d'Etudes et de Recherches Contemporaines.
"La langue utilisée constitue un autre challenge, car certaines stations - même si elles sont peu nombreuses - en sont venues à utiliser des variantes plutôt dégradées du langage" ajoute El Khalfi. "Et il y a aussi le défi des contenus, à une époque où les divertissements prévalent sur les émissions sérieuses, par exemple les programmes d'informations et culturels. Et il y a celui qui reste à relever, de l'éthique professionnelle et des frontières entre les médias et la publicité".
Le directeur du CMERC admet que ce sont les jeunes qui forment l'audience la plus importante des stations de radios. Mais que les choses ne se sont pas déroulées comme prévu.
"Les radios ne sont malheureusement pas parvenu à assumer le rôle positif qu'elles étaient supposé tenir dans le cadre de la propagation de valeurs de démocratie et de citoyenneté", note El Khalfi.
En 2006, la Haute Autorité des Communications Audiovisuelles (HACA) avait accordé les dix premières autorisations d'émissions à des radios privées. Il s'agissait de Radio Aswat, Atlantic, Cape Radio, Chada FM, Hit Radio, MFM Saiss, Souss FM, Atlas FM Radio Plus Marrakech et Radio Plus Agadir.
Med Radio, Radio Mars, Medina FM Radio Lux ont quant à elles reçu leurs licences en 2009. Yahya El Yahyaoui., chercheur dans le secteur des médias, affirme que malgré les nombreux aspects positifs de ces stations de radios privées, qui répandent autour d'elles le principe de la diversité, diffusent des émissions en direct et permettent de soulever des questions avec une audace jusqu'alors inaccoutumée, certains problèmes toutefois semblent persister.
Le plus important d'entre eux est ce qu'il qualifie de "calamité linguistique", qui trouble profondément les auditeurs, incapables de décider si la langue utilisée est l'arabe, le français ou une nouvelle variante grossière.
Pour sa part, le professeur des médias Moustapha Taleb s'interroge pour déterminer si ces stations de radio "ont été conformes à l'identité et aux valeurs de la société marocaine". Il convient qu'il y a eu une certaine hardiesse dans la manière de débattre de certains sujets.
"Le problème réside dans la façon dont ils sont susceptibles d'être traités, qui pourrait, sans le vouloir, promouvoir la dégénérescence morale", remarque Taleb.
Il ajoute, sur une note plus sombre, que les stations de radio "constituent une rupture entre l'ancienne et la nouvelle génération."
Pour Miloud Belkadi, directeur de Radio MFM, l'impact des "radios privées lancées au Maroc est 2006 est relativement positif, à un certain nombre de niveaux, notamment dans la recherche d'un renforcement de la culture de proximité et en termes d'interaction."
De plus, elles ont servi de canal de dialogue sur un grand nombre de sujets qui étaient encore récemment considérés comme tabous", dit-il à Magharebia.
Il déclare que les stations privées devraient maintenant, après quatre années d'expérience, être en mesure de "procéder à une auto-évaluation objective … ainsi que de déterminer ses points positifs et à se reconstruire sur eux, et de localiser les aspects négatifs qui restent encore en eux-mêmes un défi".
Magharebia, 27 décembre 2010